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Souffrez-vous de la maladie de Dupuytren (et cela sans même le savoir)?

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Qu’on en commun le peuple viking, un médecin-chirurgien du XVIIIe siècle et notre grand pianiste André Gagnon?

Qu’on en commun le peuple viking, un médecin-chirurgien du XVIIIe siècle et notre grand pianiste André Gagnon? Chacun de ceux-ci a connu une histoire qui sort de l’ordinaire.

Un génie en anatomie et en chirurgie

Il était une fois une maladie qui prit le nom de celui qui l’a identifié en 1831: le chirurgien Guillaume Dupuytren. Son histoire aurait sans doute pu faire l’objet d’un grand roman si son esprit prétentieux ne lui avait pas attiré les foudres de ses contemporains. Il fut affublé de plusieurs surnoms qui témoignent de sa piètre popularité : bête de Seine (il exerçait à Paris), le brigand de l’Hôtel-Dieu (il s’appropriait les découvertes de ses adjoints), le Napoléon de la chirurgie (pour sa direction tyrannique). On disait de lui qu’il était le premier parmi les chirurgiens et le dernier parmi les hommes. N’empêche qu’il fut un des plus grands chirurgiens du début des années 1800.

Tout chez lui sortait de l’ordinaire. Guillaume Dupuytren est né le 4 octobre 1777 dans un village non loin de Toulouse en France. Enlevé par des inconnus à l’âge de 3 ans, son père réussit à le retrouver et à le ramener au sein de sa vraie famille. Ne voulant pas que son fils suive ses traces comme avocat ou encore qu’il décide de s’engager dans l’armée française, il l’inscrit en médecine. Très doué, il termine son cours en à peine 3 ans et est recruté par l’Hôtel-Dieu de Paris comme chirurgien.

Dès son entrée en poste, il tombe en conflit avec son supérieur qu’il finit par remplacer quelques années plus tard. Selon les dires de ses contemporains, il était d’une dévotion infatigable à sa profession. Durant les vingt années où il fut chirurgien-chef à l’Hôtel-Dieu de Paris, il permit à cet hôpital d’acquérir une réputation internationale et se fit une très importante clientèle tant et si bien que ce fils d’une famille très modeste finit par acquérir une fortune colossale. « Son appétit de notoriété lui rend insupportable toute autre gloire que la sienne : il veut être le premier dans un village qui n’est autre que Paris. La mort de Bichat (1802) (NDA : alors patron des chirurgiens au département où travaillait Dupuytren) lui laisse le champ libre et lui inspire cette réflexion révélatrice de son caractère entier et dominateur: « Enfin, je commence à respirer. » »

Dupuytren composa lui-même ce quatrain pour décrire cette maladie :

Monsieur Dupuytren, voyez ma misère

Ma dextre rigide et mes doigts perclus

J’ai un annulaire qui n’annule guère

Et l’auriculaire n’auricule plus.

« C’est en 1831, soit quatre ans avant sa mort, que Dupuytren opéra la maladie qui porte son nom. Après avoir attendu, dans un premier temps, pendant plusieurs années dans le cas d’un homme qui souffrait d’une fibrose classique, Dupuytren disséqua la main malade, puis il opéra le cas d’un marchand de vin qui ainsi est entré dans l’histoire médicale.

L’opération consistait en une fasciectomie (libération chirurgicale des tendons) «la main du malade étant solidement fixée» en passant à travers une incision sous la peau. Après huit semaines, le doigt reprenait des mouvements normaux.

Les Leçons orales de clinique chirurgicale publiées après sa mort rapporte 17 cas de maladie de Dupuytren avec leur étiologie, symptomatologie, diagnostic différentiel, traitement et résultats. »

N’empêche que ce chirurgien anatomiste érudit a fait beaucoup non seulement pour définir cette maladie, mais aussi pour la traiter.

Qu’est donc la maladie de Dupuytren aussi appelée la courbature de Dupuytren?

La maladie affecte l’une des deux mains (rarement les deux). À un stade plus avancé, comme l’a si bien décrit le professeur Dupuytren, il y a plus de 3 siècles, la maladie fait en sorte que l’annulaire et l’auriculaire restent repliés sur eux-mêmes dans la paume de la main. Cette maladie évolue en 4 stades, dont le premier passe le plus souvent inaperçu. En réalité, la maladie commence par une légère enflure dans la paume de la main (inflammation d’un nodule palmaire) à la jonction de la main et de l’annulaire. Cette bosse est quelque peu douloureuse. Mais avec le temps, la douleur disparait. Alors arrive le deuxième stade de la maladie : le doigt adopte une légère courbure vers l’intérieur et ne peut plus garder sa forme droite comme les autres doigts. Quand cette courbure forme un angle de plus de 90 degrés, la maladie a atteint son stade 3. Au stade 4, les phalanges sont complètement recroquevillées sur elles-mêmes.

Une maladie aux origines obscures

Souvent confondues à tort, et le plus souvent en début d’évolution, avec le doigt à gâchette, les causes de la maladie de Dupuytren demeurent inconnues. Dans le cas du doigt à gâchette, ce sont les tendons qui sont en cause. Dans un Dupuytren, ce sont les fibres de collagènes qui sont responsables de la rétractation des doigts (le plus souvent l’annulaire et l’auriculaire) vers la paume de la main. Aucune cause n’a pu jamais être accordée à la maladie de Dupuytren. Sans que l’on ne sache pourquoi, cette maladie touche plus souvent les personnes souffrant d’épilepsie et d’un diabète non contrôlé. Certains ont avancé, et encore ici sans que cela ne fut prouvé, que les travailleurs manuels pourraient plus facilement en être touchés.

« On pense que la maladie de Dupuytren a une origine nordique et ce sont les invasions des Vikings au 12e siècle qui aurait propagé le gène en Europe et dans les colonies françaises et anglaises. »

La seule chose que l’on connaît avec certitude est son origine génétique. En effet, on ne retrouve pratiquement jamais cette maladie chez les peuples africains (à peine 8 cas répertoriés), ni indiens (10 cas décrits) ou vietnamiens (1 seul cas). On pense que la maladie de Dupuytren a une origine nordique et ce sont les invasions des Vikings au 12e siècle qui aurait propagé le gène en Europe et dans les colonies françaises et anglaises.

La maladie se manifeste surtout après la quarantaine et toucherait 6 fois plus souvent un homme qu’une femme. Comme elle est plus fréquente chez les descendants des peuples nordiques, le cas type est un homme dans la cinquantaine avec les cheveux blonds et les yeux bleus selon ce que nous apprend l’étude de Sandip Hindocha, Duncan Angus McGrouther et Ardeshir Bayat intitulée Epidemiological Evaluation of Dupuytren’s Disease Prevalence Rates to Etiology. L’étude a été publiée le 15 janvier 2009 dans la revue American Association for Hand Surgery.

De retour au Québec

Plus près de nous, Radio-Canada nous apprenait que notre célèbre pianiste André Gagnon a dû mettre un terme à sa carrière pendant près de 15 ans et que l’une des raisons qui ont provoqué cette absence est que le musicien avait souffert de la maladie de Dupuytren. Heureusement les traitements qu’il a suivis se sont avérés un succès et depuis 2010, nous pouvons encore bénéficier de son retour au piano.

Bien sûr, plus la maladie est diagnostiquée à un stade précoce, plus facile sera son traitement. C’est pourquoi nous vous encourageons fortement si, à la lecture de cet article, vous vous êtes reconnus dans certains symptômes, de consulter votre médecin qui vous recommandera auprès d’un spécialiste concerné.

 

@crédit Jacques Beaulieu Communicateur scientifique

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